A t’on le droit de croire aujourd’hui ? A t’on le droit de privilégier des espérances obscures à un espoir éclairé ? A t’on le droit de diriger une Vérité plutôt que de prôner l’égalité ?
Il faudrait d’abord s’interroger sur l’existence d’un être suprême, entité supérieure, extra-terrestre omniscient, amalgame de bons sentiments et de violences ordurières ? La preuve n’en a jamais été apportée, malgré la beauté du monde (qui n’a plus grand chose de naturelle), les miracles qui bousculent la position du missionnaire, les gains au loto et les résurrections de dictateurs.
Le fait que le catalogue soit vaste pourrait faire penser qu’il y ait plusieurs créateurs : il suffirait en fait de déposer sa griffe, de susciter quelques scandales, de la personnaliser à l’aide de charismatiques chamans, d’en soutirer suffisamment de notoriété pour en répandre l’envie (et en faire un besoin) au-delà d’un cercle restreint d’apôtres prêts à se sacrifier pour en porter la marque. Il faut du sang, de l’encre, des victoires, des martyrs, de l’honneur et des visions. Comme un Lagerfield qui se dit inspiré par la rue, le messager prometteur d’avenirs meilleurs doit se dire inspiré par les Cieux qui, comme la rue, sont incapables de répondre et de se définir. Comme un exégète de Chanel conspue l’apostolat de Versace, le fan de Jésus ne supporte pas l’amoureux de Mahomet, le pentecotiste ne veut pas monter avec le scientologue qui ne veut pas s’entendre avec le fisc : il n’est donc pas possible de croire en dieu et en dieu. Il faut choisir et là, malheureux, on peut se tromper.
Pascal (Blaise, pas Obispo) parie sur l’existence de Dieu (le sien bien sûr, même si le jeu n’a pas de religion), non pas parce que celui-ci lui est apparu pour défendre les Jansénistes, mais parce que l’enjeu est faible : si quitte sans dieu, ta honte est enterrée avec toi, si double parce que dieu, tu es accueilli dans la gloire. Permettez moi de souffrir l’opposition à ce pari sur la croyance : si tu as parié sur l’existence de Dieu et vécu toute ta vie selon les préceptes diffusés par ceux qui croient surtout en leur intérêt sur terre et que quand tu meurs, c’est le vide, c’est vrai que tu n’as rien perdu (puisque tu ne vas pas t’en rendre compte), tu n’as peut-être pas eu une vie très joyeuse, mais tu as pardonné à ceux qui t’ont offensé ou tu leur as mis une belle bombe dans la gueule. Mais parlons de ceux que tu as entraîné dans ton sillage : tu crois que la femme qui a dû porter le hijab, la perruque ou 12 enfants n’a rien perdu à se morfondre dans les couches inférieures de l’humanité ; tu crois que les enfants qui se sont retrouvés dalaï lama, enfants de choeur, mariés à 4 ans n’ont pas oublié de vivre leur enfance. Et puis ton coiffeur, celui qui s’est spécialisé dans les rouflaquettes, les tonsures, les barbes aérodynamiques et les chignons serrés, tu crois que cela n’aurait pas été mieux pour sa conscience, s’il avait pû t’inviter à son mariage avec Eugène.
Et qu’il y a t’il à gagner dans l’existence de Dieu : la consolation d’une vie de misère, le bonheur et la plénitude éternels et autres gnangnanteries. Après tout (et la vie), pour quoi pas, je n’ai rien contre le paradis, mais avec qui ? Chacun peut-il s’isoler dans une cellule à regarder la télévision, lire, faire l’amour avec Angelina Jolie ou faut-il supporter la présence de Soeur Marie-Paupiette qui a passé sa vie à recueillir des chats abandonnés, Rahimu qui avec 20 co- disciples s’est immolé pour rejoindre le très haut, X qui a établi, avec son avion, l’an 0 du terrorisme expiatoire, Bill qui a escroqué pour oeuvrer dans le charitable… Et puis un Dieu qui ne supporte la nudité qu’avec une feuille de vigne, qui ne tolère le vin que s’il est de messe basse, qui a fait que ses prophètes ne soient jamais entendus dans leur pays mais trop présents partout ailleurs, qui envoie des tremblements de terre pour rappeler sa loi et son opposition au préservatif et qui a permis que Jeanne d’Arc entre dans les histoires drôles comme femme au foyer… Faut-il se vanter de vouloir y être ? Pour reprendre Woody Allen : la vie c’est court, mais, au moins, on connait la fin.
Moi, qui ais commis les sept pêchés capitaux, ne m’en suis jamais repentie (sauf sur les hanches), je ne voudrais croire qu’en une seule chose : pas à un mortel paradis, ni à un néant implacable, juste à ma part d’ange : laissez-moi veiller sur mes enfants et je serai comblée.